Le coût de la vie

Deborah Levy, Éditions du sous-sol (août 2020, mai 2023 pour la version poche), traduit de l’anglais par Céline Leroy, 8,70€, 176 p

Une femme divorce à 50 ans passés, sa vie s’écroule, sa vie recommence. Ce livre est le récit de cette renaissance, cette liberté retrouvée, ces portes qui s’ouvrent. C’est magnifique et inspirant.

« On a toujours plus d’irréalité que l’autre », cadeau signé Marguerite Duras et offert par Deborah Levy en exergue de ce récit inclassable. Comme une recherche ou révélation de soi. La vie n’a pas démarré a 50 ans bien sûr, l’autrice a vécu, en Afrique du Sud notamment, elle a aimé, elle s’est mariée, elle a eu des enfants. Mais la vie libre a démarré à 50 ans assurément. Parce qu’il a fallu apprendre à vivre seule, à payer ses factures qui s’amoncelaient, à trouver du temps pour soi, pour écrire (seule source de revenus), parce qu’il a fallu se faire une place qui ne soit pas définie par l’autre.

Ce livre est impossible à résumer ! Ni récit, ni biographie, ni roman, ni essai. Quatorze courts chapitres qui sont centrés sur un thème, et s’entrelacent les uns avec les autres, avec des motifs en boucle : la solitude, la liberté, l’écriture, le sens, l’amitié, l’amour.

Deborah Levy appelle autour d’elle, comme des ami.e.s, des auteurs et autrices aimés, Marguerite Duras ou Simone de Beauvoir pour les chemins qu’on empreinte vers la liberté. Mais aussi Dickinson, Camus, Proust, Garcia Marquez, ou encore des artistes, Louise Bourgeois, et quelques autres. Il y est question de ce que c’est de devenir, d’être, de s’affirmer, d’écrire. L’écriture comme une question de « regard et d’attention accordée au monde ». comme l’autrice s’inspire de « Jane Eyre », de Charlotte Brontë pour le dire. « Écrire me plaisait parce que c’était une invitation à se glisser sous la réalité apparente des choses, à voir non seulement l’arbre mais aussi les insectes qui vivaient dans son infrastructure (…) » dit-elle encore un peu plus loin. Et il y a quelques réflexions sur l’écriture (le « je », le traitement du temps, par exemple) qui sont autant d’ouvertures sur l’univers littéraire de l’autrice, ses réflexions. Et subtilement, sur ces problèmes éternels en littérature, on perçoit comment elle résout, elle, ces questions-là… Elle montre mais n’explique pas…

Toutes les pages se cornent et les phrases se soulignent, et se sont à chaque fois des portes qui s’ouvrent en nous. On lit. On souligne. On relit. On a envie de dire et de partager. Lisez et relisez, par exemple (mais on pourrait tout citer…) l’épisode du poulet, celui de la glace au chewing-gum, des boucles d’oreille en forme de chouette. Par exemple…

Les ami.e., les anges gardiens, le père de ses filles, ses filles, sa mère, chacun et chacune sont délicatement remerciés, parfois nommés, parfois pas, comme autant de brins de laine venus tisser sa vie nouvelle. Vie dure, mais assumée. Ce livre est un livre d’espoir et de renaissance, à mettre entre toutes les mains.

Alors ce livre il est pour qui ? Les sœurs les filles les amies les mères. Et les hommes qu’on aime aussi, bien sûr.

Marie-Eve

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